09 mai 2022|Sciences Po Bordeaux

BALAFON : renforcer le lien avec le continent africain

Créé en 2016, le programme BALAFON permet à des étudiants africains d’intégrer Sciences Po Bordeaux, en les soutenant financièrement. Focus sur une initiative ambitieuse, qui s’enrichit chaque année de ces échanges culturels.

Depuis plus de cinquante ans, Sciences Po Bordeaux entretient des relations étroites avec de nombreuses universités africaines, via notamment « Les Afriques dans le Monde[1] », unité mixte de recherche du CNRS. Une fibre également nourrie par son important réseau d’alumni évoluant dans différents pays sur le continent africain, dont la réussite fait la fierté de l’école.

C’est dans cette tradition que Sciences Po Bordeaux a souhaité, en 2016, lancer le programme BALAFON, dont l’objectif s’illustre clairement dans la signification de l’acronyme choisi à l’époque : Bordeaux-Afrique L’Ambition FOndatrice. À travers cette initiative, l’établissement se fixe effectivement comme intention de promouvoir l’insertion d’élèves originaires de lycées d’états africains, dès la première année de formation, dans l’optique, cinq ans plus tard, d’obtenir le diplôme de Sciences Po Bordeaux.

De la volonté à l’action

Ludovic Renard, chef du Service des Relations Internationales de Sciences Po Bordeaux, a participé à la mise en œuvre de cette initiative, encouragé par Vincent Hoffmann-Martinot, directeur de Sciences Po Bordeaux de 2007 à 2016. Il raconte : « Il y a encore quelques années, nous avions certes l’habitude de recevoir de nombreux étudiants africains doctorants, mais nous commencions aussi à perdre notre public de formation initiale. Nous partagions cette volonté, avec Vincent Hoffmann-Martinot, de faire revenir des étudiants africains à l’Institut, dès le premier cycle ». C’est donc sous l’impulsion financière et collaboratrice de la Ville de Bordeaux, également fidèle à sa vocation d’accompagnement des élites africaines dans leur formation, que le projet se concrétise.

Le programme met alors plusieurs mois à se construire, pour permettre aux futurs étudiants d’intégrer l’Institut dans les meilleures conditions possibles. Ludovic Renard se souvient : « Les contacts que nous avions déjà nous ont rapidement orienté vers Abidjan. Très vite, nous avons mis en place une convention tripartite entre l’ambassade locale, Sciences Po Bordeaux et la mission laïque française (réseau d’établissements d’enseignement français à l’étranger qui pilote les lycées français). Après quelques aller-retours sur place, nous avons identifié des établissements d’excellence. Plusieurs proviseurs étaient intéressés et nous avons pu lancer le premier processus de recrutement dans la foulée ».

Deux lycées d’Abidjan se joignent alors au programme BALAFON : le Lycée classique et le lycée Sainte Marie d’Abidjan. Une préparation au concours de Sciences Po Bordeaux (destinée aux élèves de première et terminale) est également mise en place au lycée Jean Mermoz ; préparation à laquelle les deux autres lycées du programme peuvent aussi prendre part. Ludovic Renard ponctue son récit d’une anecdote : « Ce qui est drôle, c’est qu’on s’est rendus compte que les proviseurs de ces lycées n’avaient pas pour habitude de collaborer ensemble ! Le programme BALAFON a finalement permis de renforcer leurs relations ».

Côté organisation, le programme associe étroitement cinq entités partenaires : Sciences Po Bordeaux et les institutions publiques bordelaises qui soutiennent le projet (la Ville de Bordeaux et Bordeaux Métropole), le poste diplomatique français de Côte d’Ivoire, les lycées engagés, les autorités politiques responsables de la politique éducative et universitaire de Côte d’Ivoire ainsi que la Fondation Prospective et Innovation. Une convention de partenariat a également été tissée avec L’Oréal, entreprise présente sur le continent africain et financeuse de la bourse de l’une des élèves du programme issue de l’African Leadership Academy de Johannesburg. 

Car si l’aide aux études et l’intégration à Sciences Po Bordeaux jusqu’à obtention du diplôme constitue un premier volet du programme, celui-ci est complété par une facette financière, destinée à aider les étudiants dans leurs études bordelaises. Les élèves recrutés profitent ainsi de la gratuité des frais d’inscriptions, d’une bourse de vie de 7 500€ (soit 750€ par mois sur la totalité de leur scolarité) et de la prise en charge d’un billet d’avion aller/retour pour Abidjan, chaque année. Ils peuvent également bénéficier d’un soutien financier complémentaire du fonds social FAIRE de Sciences Po Bordeaux et d’une priorité de logement au CROUS.

Regards croisés

À leur arrivée à Bordeaux, les étudiantes et étudiants sont immédiatement accompagnés par un tuteur individuel désigné (la plupart du temps, un enseignant). « Les élèves du programme BALAFON sont chouchoutés ! » sourit Sophia Snihji, responsable du Service Vie étudiante et Égalité des chances de Sciences Po Bordeaux. « Ils sont systématiquement encadrés. Ce soutien est nécessaire, le système scolaire français étant différent du système ivoirien. Par ailleurs, il s’agit souvent de leur premier voyage en France et le changement peut être difficile à appréhender : nouvelle culture, nouveau climat... Ils s’adaptent assez rapidement, malgré tout. Le fait qu’ils se connaissent tous entre eux leur permet aussi de s’entraider ». L’accompagnement de Sciences Po Bordeaux prend également une forme pédagogique, l’école organisant des cours de soutien en économie (une matière absente du programme des lycées ivoiriens) pour les élèves.

Les promotions de Sciences Po Bordeaux comptent à l’heure actuelle 12 élèves du programme BALAFON. Un dispositif « gagnant-gagnant » qui s’avère fructueux tant dans l’échange culturel qu’il engendre, que dans le pari d’excellence qu’il développe. Pour exemple, le parcours exemplaire de Mariam Doumbia, majore du bac scientifique en Côte d’Ivoire en 2017 et ancienne élève du Lycée classique d’Abidjan-Cocody. Elle est aujourd’hui élève en cinquième année à l’Institut.

Sophia Snihji confirme cette volonté d’enrichissement mutuel : « Nous poursuivons nos objectifs d’ouverture. Les autres continents sont bien représentés dans nos élèves internationaux, il est essentiel que l’Afrique s’y trouve. Sciences Po Bordeaux a toujours été un pôle tourné vers ce continent. Cette relation particulière renforce le leitmotiv de l’école : l’échange et les regards croisés entre cultures ».

 

Témoignages d’étudiants

Leïla (Mahougnon) Traore, étudiante en 4ème année à Sciences Po Bordeaux

Leïla est élève en master GEA (Géo-Économie Appliquée). Elle fait partie du programme BALAFON et a intégré Sciences Po Bordeaux en 2018.

Je suis une ancienne élève du Lycée Sainte Marie de Cocody. À l’époque, nos éducateurs nous ont parlé du concours de Sciences Po Bordeaux, que je ne connaissais pas. J’ai participé à des séances de formation au lycée Mermoz et j’ai finalement été sélectionnée pour entrer en première année, filière générale. À mon arrivée, j’ai été accompagnée par le Service des Relations Internationales : heureusement, car il y avait beaucoup de démarches administratives à effectuer ! Je me souviens notamment de ma demande de visa. Pour moi, le programme BALAFON est une opportunité, voire une aubaine. On ne vient pas tous de famille aisée et grâce à ce dispositif, j’ai la possibilité de faire de très bonnes études. En ce qui concerne mon avenir professionnel, quand j’ai quitté le Lycée Sainte Marie, je pensais au droit des affaires. Mais depuis que je suis étudiante ici, j’ai découvert de nouvelles disciplines et je penche finalement pour la finance et l’investissement, avec une préférence pour la banque. Je n’avais jamais fait d’économie jusqu’à 18 ans et c’est finalement vers cette matière que je me dirige ! Je pense sérieusement que le « tampon Sciences Po Bordeaux » est une clé pour la suite. J’ai des ambitions en tant qu’ivoirienne et je sais que ce diplôme va m’ouvrir des portes. C’est une chance incroyable ».

 

Lenissonguy Coulibaly, étudiant en 3ème année à Sciences Po Bordeaux

Lenissonguy a intégré le programme Sciences Po Bordeaux en 2019.

J’ai 20 ans et je viens du Lycée classique d’Abidjan. J’ai entendu parler du concours de Sciences Po Bordeaux grâce à mon conseiller d’éducation, mais je savais aussi que Mariam Doumbia, qui était très populaire grâce à ces résultats scolaires, avait été sélectionnée. Dépendant du système ivoirien, nous avons profité d’un concours spécial : une épreuve en anglais, une épreuve de culture générale ainsi qu’un entretien oral avec les responsables du programme. Mon arrivée à Bordeaux était difficile : passer des études secondaires au supérieur, puis du système ivoirien au système français… le décalage était total ! Mais j’ai pu compter sur l’administration pour faciliter mon intégration. On est également solidaires entre élèves du programme, on parle beaucoup. Ce que j’apprécie particulièrement ici, ce sont les différents outils digitaux auxquels j’ai accès et qui me permettent d’approfondir mes cours. J’utilise beaucoup la bibliothèque numérique, je profite aussi d’Europresse. J’aime bien Moodle aussi ! À la fin de ces cinq années d’études, j’aimerais bien travailler en cabinet d’audit ou de conseil. Je suis convaincu que mon diplôme pourra jouer en ma faveur, je sais qu’il est reconnu et que le profil polyvalent des élèves est apprécié. Qui plus est, mes professeurs sont des leaders dans leur domaine et je suis heureux de pouvoir profiter de ce réseau.

 

[1] Anciennement connue sous le nom de Centre d’étude d’Afrique Noire (CEAN)

 

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