06 avril 2023|Chaires

Des chaires actives et précieuses

Autonomes dans leur fonctionnement et expertes dans leur domaine d’intervention, les chaires d’enseignement et de recherche de Sciences Po Bordeaux sont précieuses pour l’Institut. Elles incarnent l’intérêt d’un dispositif partenarial entre le milieu universitaire, le monde socio-économique et le monde institutionnel et profitent autant à l’institut qu’aux structures partenaires.

« Une chaire est un outil de promotion d'une discipline ou d'un savoir émergent, jouant un rôle d’interface entre le milieu universitaire et le monde socio-économique. Sa mission est de favoriser la transmission des connaissances et de promouvoir la recherche ». Cette définition – quoiqu’incomplète - résume en quelques mots les chaires d’enseignement et de recherche dont l’émergence remonte en France aux années 1980.

Ce dispositif de partenariat a depuis essaimé dans l’enseignement supérieur. Sciences Po Bordeaux dispose ainsi de quatre chaires dont deux sont accompagnées par la Fondation Bordeaux Université1. Toutes ont pour mission de participer à la professionnalisation des formations et l’insertion des diplômés, soutenir et promouvoir la recherche d’excellence, augmenter l’attractivité de Sciences Po Bordeaux et du site universitaire, et enfin renforcer sa dimension internationale. Focus sur trois d’entre elles qui s’adressent aussi bien à la formation initiale, continue et à la recherche. Il s’agit, par ordre de date de création, de la chaire Défense & Aérospatial, de la chaire TRENT transitions énergétiques territoriales2 et de la chaire TerrESS Territoires de l’Économie Sociale et Solidaire.

Des chaires expertes portées par des responsables de référence

Ces trois chaires interviennent sur des champs totalement différents et spécifiques, mais elles ont en commun d’être expertes dans leur domaine d’intervention. Cette caractéristique tient déjà au profil de leur responsable. La chaire Défense & Aérospatial est ainsi pilotée depuis septembre 2014 par son créateur, Jean-Marc Laurent, ancien général de corps aérien, par ailleurs Ingénieur de l’École de l’air et diplômé de l’École de Guerre. Hubert Delzangles, professeur de droit public, a fondé pour sa part la chaire Transition énergétique territoriale (TRENT) en janvier 2019. Il assure également la responsabilité du double Master Expertise en affaires publiques-Droit public des affaires (EAP-DPA) de Sciences Po Bordeaux et de l’Université de Bordeaux. Enfin, Timothée Duverger a créé la chaire Territoires de l’économie sociale et solidaire (TerrESS) en septembre 2020. Ingénieur de recherche à Sciences Po Bordeaux, chargé de mission ESS et développement durable et chercheur associé au Centre Émile Durkheim, ce dernier connaît par ailleurs parfaitement le monde institutionnel pour avoir été conseiller auprès d’élus de collectivités.

Une imbrication forte dans les missions clés de l’école

Ces trois chaires participent directement à l’essor de la recherche au sein de l’établissement, mais aussi à sa formation initiale et continue. Dans le premier cas, elles développent des modules destinés à des cadres des secteurs d’activité concernés. Dans le second cas, elles nourrissent la maquette pédagogique de l’école à travers des enseignements de la 3e à la 5e année, très prisés des étudiants. Grâce à l’écosystème qu’elles ont tissé, les chaires de Sciences Po Bordeaux assurent aussi un rôle de médiation entre les élèves de l’école et de futurs employeurs. Défense & Aérospatial, TRENT et TerrESS contribuent par ailleurs à la diffusion de connaissances, via leurs travaux d’analyse et de recherche, l’organisation de conférences, la diffusion de contenus spécialisés, etc. Des structures qui sont autant de relais de l’esprit de Sciences Po Bordeaux et qui s’avèrent actives et précieuses pour l’établissement !

1 Organisme opérateur de mécénat sur le site bordelais, cette fondation assure le lien juridique et financier entre des mécènes et deux des trois chaires de Sciences Po Bordeaux

2 La chaire TRENT est une prolongation avec changement de prisme de la chaire PPP (partenariats publics-privés) qui a été historiquement la première chaire de l’établissement

Présentation des chaires

Chaire Défense & Aérospatial

Entre terre et ciel

« Lorsque j’ai quitté l’uniforme, après plusieurs responsabilités au ministère de la Défense dans les affaires stratégiques, j’ai souhaité poursuivre mon parcours professionnel en partageant mon expérience au sein du monde universitaire tout en continuant à m’enrichir intellectuellement à son contact». Jean-Marc Laurent revient par ces mots aux origines de la chaire Défense & Aérospatial fondée en 2014. « Je connaissais l’institut pour y donner occasionnellement des cours « Défense et Stratégie » mais je n’imaginais que celui-ci serait intéressé par une collaboration plus permanente. C’est Vincent Hoffmann-Martinot, le directeur d’alors, qui m’a convaincu de créer une chaire. J’ai alors pris mon bâton de pèlerin pour convaincre des mécènes de m’accompagner, car cette chaire est, avant tout, un partenariat-public-privé». Après Dassault Aviation, Safran et Thales - toujours présents – ArianeGroup et le CEA (direction des applications militaires) se sont associés à la chaire fin 2017. « Sciences Po Bordeaux accompagne la chaire d’un soutien aussi constant qu’efficace et la fondation Bordeaux Université assure, entre autres, la relation conventionnelle avec les mécènes et la transparence de l’usage fait par la chaire de leurs dons» précise Jean-Marc Laurent. La gouvernance est, quant à elle, réalisée par un comité de pilotage stratégique, qui s’appuie sur un comité pédagogique pour le volet formation. Sur le plan organique, la chaire compte 2 à 3 permanents plus des stagiaires mais s’appuie aussi sur un large réseau externe de compétences et de partenaires. « En 2024, la chaire aura 10 ans. C’est la plus longue affectation de ma vie professionnelle » plaisante l’ancien pilote de chasse, qui a terminé sa carrière comme général commandant les forces technico-opérationnelles de l’armée de l’Air et de l’Espace et, simultanément, comme commandant militaire de la zone de défense et de sécurité Sud-Ouest.

Un large rayon d’action

La chaire a progressivement élargi son champ d’activité. Tout a commencé par la formation, initiale pour des étudiant(e)s ou continue pour des cadres. Puis, la chaire s’est investie dans la recherche et à des opérations de diffusion. Enfin, la notoriété de la chaire aidant, elle fut invitée à des partenariats pédagogiques ou d’innovation. La formation initiale a permis de sensibiliser plus de 1500 étudiants de l’institut et d’établissements français ou internationaux aux questions stratégiques. A l’IEP, où un cours complet est délivré depuis 10 ans, « mon rôle ne se limite pas à l’enseignement. Je m’efforce aussi de répondre aux interrogations des étudiant(e)s qui s’adressent à moi sur de nombreux sujets, de les conseiller et de les accompagner vers des stages voire l’emploi ». précise Jean-Marc Laurent. La formation initiale, c’est aussi une école d’été « Défense et Espace » dont la notoriété depuis 7 ans a conduit à l’élargir au monde professionnel. Elle est donc aussi une forme de formation continue. Mais, dans ce domaine, le succès de la chaire, c’est son Cycle d’études supérieures défense et Aérospatial (CESDA), formation de haut niveau pour des cadres supérieurs et dirigeants civils et militaires. C’est aussi un Cours de Perfectionnement Défense & Aérospatial (CoPDA) pour cadres juniors. La chaire, c’est aussi la recherche stratégique. Après 3 années d’études sur les conflits majeurs, la chaire travaille sur le domaine spatial qui est devenu un foyer potentiel de crises sécuritaires. La recherche, c’est aussi le soutien aux chercheur(e)s (conseil, partage de réseau, financement de thèses, prix, etc.). Cette action de recherche a conduit à des coopérations, qu’elles soient pédagogiques, comme avec le Nouvelle-Aquitaine Academic Space Center (NAASC), ou politico-économiques, comme avec Way4Space (centre d’innovation spatial). Formation et recherche débouchent sur de nombreuses actions de diffusion qui permettent de s’adresser à un plus large public (conférences, ouvrage, presse, etc.). « On voit combien la chaire s’inscrit dans la dimension pédagogique et de recherche de Sciences Po Bordeaux ainsi que dans son économie générale, mais combien aussi elle est partie intégrante de l’écosystème Aéronautique Spatial et Défense régional et national » poursuit son responsable.

Chaire TRENT - Transitions énergétiques territoriales

L'acceptabilité sociale de la transition énergétique

Professeur de droit public, spécialisé en droit de l'environnement, de l'urbanisme et de l'énergie, Hubert Delzangles a commencé à réfléchir à la création de la chaire dont il est aujourd’hui responsable scientifique dès 2015. « Entre la COP 21, la loi transition énergétique et la question de la croissance verte, le sujet devenait central. Cette accélération s’est faite sans certitude à l’égard des objectifs, des moyens, et des réactions de la population. Mon idée a donc été de réfléchir à la façon dont un territoire pouvait s’adapter à cette transition ». Après une première version intitulée PPP, la chaire TRENT transitions énergétiques territoriales a pris corps en 2021. « Une chaire demande un minimum de temps pour l’organiser, la lancer et la financer » poursuit-il, non sans insister sur sa vocation première. « Notre chaire participe à la diffusion du savoir à destination des étudiants et du grand public sur un sujet au cœur des grandes questions d’actualité, ce qui explique qu’elle est en résonance avec une grande école comme Sciences Po Bordeaux ». Le sujet de la transition énergétique s’avérant particulièrement vaste, TRENT centre son action sur ses conséquences territoriales et, de manière encore plus pointue, sur l’acceptabilité sociale des formes de transitions énergétiques sur un territoire donné, en fonction de ses caractéristiques morphologiques et sociologiques. « Une région comme la Nouvelle-Aquitaine – partenaire de notre chaire – mise plutôt sur le photovoltaïque et la méthanisation (en tout cas dans la partie sud de la Région) alors que d’autres régions vont capitaliser sur d’autres types d’énergies renouvelables » explique le professeur de droit.

Des actions de terrain

La chaire TRENT s’appuie sur ses travaux de recherche et ses observations de terrain pour développer son contenu expert. Elle assure un rôle d’observateur, notamment lors de l’accueil à Sciences Po Bordeaux de la commission nationale du débat public [1] (CNPD) à propos de l’éolien en mer au large d’Oléron, ou de co-organisateur pour le colloque sur l’appropriation territoriale et citoyenne des énergies renouvelables [2]. Son apport est particulièrement utile aux étudiants des masters Expertise en affaires publiques / Droit public des affaires et Gouvernance de la transition écologique de Sciences Po Bordeaux. Ainsi, les fonds de la chaire ont permis à la promo de ce dernier cursus de financer un voyage d’études à Bruxelles pour échanger avec des commissaires et parlementaires européens et des acteurs économiques de l’agrivoltaïsme. Une expérience concrétisée par la rédaction d’un mémoire collectif. « TRENT fait le lien entre l’institut, le monde professionnel et des acteurs majeurs de la transition énergétique » résume Hubert Delzangles. Sur le plan régional, les colloques sont ainsi organisés souvent en partenariat avec le réseau Acclimaterra [3], et avec le soutien économique de tous ses partenaires : Région Nouvelle-Aquitaine, Engie, Caisse des Dépôts et Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique. Parmi ses nouveaux axes de travail, la chaire s’intéresse particulièrement aux blocages sociaux, techniques, juridiques et politiques des projets de transition énergétique et explore la meilleure manière de les développer sans externalités négatives. Elle planche aussi sur les moyens d’associer des communautés locales et citoyennes à des projets ENR, thème d’un colloque qu’elle organise en octobre 2023. « La raison d’être de notre chaire est de faire le lien entre des opérateurs, des institutionnels, des chercheurs, des étudiants et le grand public autour de cette question ». Un vrai mix d’énergie !

 

[1] Journée du 19 octobre 2022 organisée à l’Hôtel de Région en partenariat avec le réseau régional de recherches sur la transition énergétique R3 TESNA.

[2] Acclimaterra, comité scientifique régional sur le changement climatique, bénéficiant du soutien du Conseil régional Nouvelle-Aquitaine.

[3] Journée du 10 novembre 2021 qui a donné lieu à un atelier l’après-midi sur le rôle et les enjeux des recherches en sciences humaines et sociales pour la transition énergétique des territoires suivi d’une Rencontre Sciences Po / Sud Ouest avec le Grand Oral de Chantal Jouanno, présidente de la CNPD.

Chaire TerrESS - Territoires de l’économie sociale et solidaire

Former, informer, valoriser

Créée en 2020 en partenariat avec Harmonie mutuelle, AG2R La Mondiale, Fondation du Crédit coopératif et Up, la chaire TerrESS vise à consolider et développer un véritable pôle de formation autour de l’ingénierie de projet territorial en économie sociale et solidaire. Son fondateur et responsable, Timothée Duverger, ingénieur de recherche à Sciences Po Bordeaux, est par ailleurs responsable du master Économie sociale et solidaire et innovation sociale (ESSIS) et de l’executive master Stratégie, territoires et projets innovants dans l’économie sociale et solidaire (STPI-ESS) de l’établissement. « La chaire vise à former, informer, observer et valoriser l’économie l’ESS comme modèle de développement des territoires » souligne l’intéressé, avant de décliner plus précisément ces axes en lien avec l’école. Outre le développement de modules d’enseignement en formation initiale et continue de l’école, TerrESS participe à des travaux de recherche-action sous la houlette de son comité scientifique présidé par Robert Lafore, ancien directeur de l’établissement et référence dans le champ de l’économie sociale et solidaire. Timothée Duverger met aussi en lumière l’implication de la chaire pour l’essor de l’entreprenariat en ESS au sein de l’institut, une démarche concrétisée notamment par la création d’une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) baptisée ACC’ESS pour et avec ses étudiants de 5e année. Ces derniers assurent des missions d’accompagnement et de conseil en ESS, une mise en abyme idéale sur le plan pédagogique via cet outil de professionnalisation. Citons également l’association ESSplicite dont l’intitulé éponyme explicite son action de sensibilisation à l’économie sociale et solidaire, principalement auprès d’un public jeune.

Une ère d’influence multi-acteurs et multi-niveaux

« Nous diffusons les valeurs et processus de l’ESS » résume d’un trait le responsable de la chaire. Lequel souligne également son audience multi-acteurs et multi-niveaux. Très impliquée dans le tissu local et régional, TerrESS multiplie les interactions avec des acteurs spécialisés : Chambre régionale de l’ESS, Club ESS des collectivités locales…Elle mène des travaux novateurs sur la « responsabilité territoriale des entreprises ». La chaire trouve en outre un écho à l’échelle nationale, des étudiants de l’école ayant eu l’opportunité de discuter pendant 2h du sujet avec Marlène Schiappa, actuelle Secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale et solidaire et de la Vie associative. Timothée Duverger travaille également étroitement avec ESS France, notamment sur l’évaluation de la loi Hamon de 2014, et a été désigné comme personnalité qualifiée du Conseil supérieur de l’ESS. On reconnaît aussi une influence internationale à la chaire dans la mesure où elle pilote le groupe de travail « recherche » du Global Social Economy Forum (GSEF)1. TerrESS sera représentée par ailleurs au grand forum de l’ESS de Dakar avec une plénière animée par Timothée Duverger. « Nous assumons pleinement notre mission de promotion et de valorisation de l’ESS mais avec une distance critique » indique ce dernier, évoquant d’un côté « l’utopie inachevée de l’ESS » mais de l’autre « son poids socio-économique » avec 10% des emplois en France et la mobilisation de 13 millions de bénévoles. Ce champ d’activité gagne chaque jour en reconnaissance, avec une vingtaine de lois cadres au niveau international, un plan d’action de l’UE, une recommandation de l’OCDE ou encore une résolution de l’ONU. La chaire, très présente à travers des événements multiples et variés, œuvre aussi sur le plan juridique et législatif. Un groupe de travail de la Confédération Générale des Scop étudie par exemple un modèle coopératif imaginé par des chercheurs slovènes permettant aux TPE/PME sans repreneur d’assurer néanmoins leur transmission, lequel pourrait donner lieu demain - pourquoi pas- à des mesures législatives en France. On comprend dès lors que le sujet – du local au global – sensibilise de plus en plus d’étudiants de Sciences Po Bordeaux. Lesquels sont par ailleurs très sollicités par des structures ESS pour leur apprentissage.

 

1 La ville de Bordeaux est présidente de ce Forum mondial de l’économie social, association internationale de gouvernements locaux et de réseaux de la société civile engagée dans l’ESS